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Spring Breakers, de Harmony Korine

 

 On ne sait pas bien pourquoi Harmony Korine a voulu traiter de ces fêtes orgiaques dans Spring Breakers : pour son matériau filmique exceptionnel et tout à fait jouissif ; ou pour dénoncer la perversion du « rêve américain » ? Finalement peut importe, le réalisateur joue sa carte à fond et nous livre un film spectaculaire, sans compromis, orgasmique.

 

Jamais le terme de jouissif n’aura été aussi approprié pour qualifier un film. Ce n’est pas seulement de la jubilation, c’est véritablement de l’orgasme, de la pornographie que filme Harmony Korine. Dès la séquence d’ouverture, sexualité, alcool et drogues sont réunis autour du hip hop. Les corps sont souillés par le soleil, par l’alcool qui gicle des bouteilles, par la sueur… Jamais je n’ai vu de séquence aussi pornographique au cinéma sans qu’aucun sexe ne soit montré frontalement, sans qu’aucune semence en elle même ne soit déversée.

 

En cela, le film d’Harmony Korine est profondément subversif. Il reprend tous les codes, toutes les modes d’aujourd’hui : musique hip hop, électro et pop ; des jeunes filles dénudées qui sucent des glaces de façon tout à fait indécente etc. Pourtant, il va au delà de l’esthétique d’un simple clip d’Usher ou Sean Paul. Il y a une puissance de détournement dans son film qui tient également du choix de ses actrices. Directement sorties des jupons de Disney Channel, ces bombes sexuelles en puissance brisent leur image de petites filles ennuyeuses à la High School Musical. Ces gueules d’anges sont souillées, déchues, le maquillage coule, les bikini ne voilent rien de leurs défauts physiques. Attirées par la mode et les paillettes d’une beuverie sur la plage pas plus différente de celles qu’elles font déjà à la fac, les jeunes filles décrochent complètement de la réalité pour vivre leur Spring Break à fond, comme elles l’ont rêvé.

 

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Ainsi, ce n’est pas que le rapport à la sexualité qui est subversif dans Spring Breakers. Le traitement de la violence dans le film a le pouvoir de mettre profondément mal à l’aise le spectateur. Lorsque les filles rejouent le casse d’un fast food sur un parking ; ou menacent de braquer le petit mafieux perché qui les a recueillies (James Franco est formidable, une vraie bête) ; comme elle, on perd le sens des réalités. Où s’arrête le jeu, la simulation, la vraie violence ou la menace sourde ? Peu à peu le réalisme, la vraisemblance des évènements s’amenuise. Comme les personnages, le spectateur perd pied, tout effet de réalité est effacé derrière les ralentis, les flashs fluorescents, et les giclures.

 

On en viendrait presque à être déçus qu’Harmony Korine garde un personnage moral en la personne bien fade de Selena Gomez qui nous empêche peut être d’adhérer complètement à la démarche de plus en plus folle et surréaliste des autres filles. Spring Breakers était un pari osé, que ce soit pour des raisons politiques ou simplement par pur formalisme, mais finalement peu importe car le résultat est efficace : c’est sale et humide.

 

Clara Lavigne

 

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