Le ballon est dans les airs, flottant en attendant qu’un joueur le rattrape. À sa retombée, une dizaine de corps noyée dans d’immenses armures se jette dessus. Ces footballeurs américains hurlent, se battent et n’ont peur de rien. Ce ne sont pas des hommes mais des jeunes filles d’une quinzaine d’années. Ce sont des guerrières qui doivent se battrent toute leur vie pour exister.
Céline Sciamma nous offre un nouveau récit initiatique après l’impressionnant Tomboy. Son personnage, plus âgé, veut encore intégrer un groupe pour se sentir vivante. Avec cette bande de filles, elle va tout connaître : la violence, la joie, l’amitié, la confiance. La réalisatrice filme ce groupe de très près pour y déceler toutes leurs fêlures, mais aussi ces nombreux détails qui nous font voir plus loin que les clichés que nous avions d’elles au départ.
Même si la fin s’avère réussie, il est regrettable de voir Vic seule à l’écran. Au cadre, le groupe l’emporte sur l’individu grâce à sa dynamique, son humour et sa gravité. Sciamma prolonge néanmoins avec cohérence sa ligne directrice. Les problèmes d’identité sexuelle constituent le cœur de sa filmographie, et sa protagoniste enfermée dans un environnement où la virilié seule peut la sauver le démontre clairement.
Finissons en confessant que ce portrait de la jeunesse est un succès. La cinéaste a dans sa palette plusieurs pinceaux qui lui permettent de varier ses nuances. Tantôt sombre, on y décèle l’extrême solitude à laquelle cette adolescente est confrontée. Tantôt lumineux, on comprend quelle satisfaction il peut y avoir à entrer dans un clan. Celui-ci ne peut fonctionner que par la diversité et l’échange. Résultat, le pluriel prend l’ascendant sur le singulier, et devient unique.
Hugo Harnois.
Toutes les critiques d’Hugo Harnois sur www.septieme-sens.net